"Le 29 mai 1784, le ballon de l'Académie de Dijon (104 000 pieds cubes
3565 m3) avait été enflé d'air
commun. Les commissaires jugèrent bon de le laisser en cet état
jusqu'au lendemain soir, pour faire sécher quelques endroits qui venaient
d'être recouverts de vernis. Ils avaient observé que le thermomètre
y était monté à 39 degrés, tandis qu'il n'était
que de 23° exposé au soleil. Quelques jours auparavant, ils avaient
constaté qu'il s'était élevé jusqu'à 60°
dans les mêmes circonstances, sans noter cependant la température
extérieure (les températures sont probablement
données en degrés Réaumur, à peu près seuls
en usage à cette époque). Le 30 mai, vers midi et demi,
il s'éleva un vent violent qui commença à agiter le ballon.
Deux hommes, laissés à sa garde, voulurent le retenir par les
mailles du filet. Les morceaux leur en restèrent dans la main et l'aérostat
leur échappa. Il s'éleva d'abord dans la cour au-dessus de l'une
des perches de quarante-trois pieds 14m qui avait
été placée pour élever le filet, emportant, outre
le filet, des cordes et le cercle équatorial, en tout 250 livres 122
kg, y compris le poids de l'enveloppe. Le ballon était retenu
par trois cordeaux passés sur une grosse corde tendue entre les deux
perches. Il en cassa deux et emporta le piquet du troisième. Il sortit
de la cour par-dessus un bâtiment situé à l'est. S'étant
abaissé dans une autre cour, derrière ce bâtiment, le nommé
Crosnier, âgé de seize ans, pesant soixante et onze livres 34,7
kg, saisit courageusement une des cordes pour le retenir et la tourna
autour de son poignet. Il fut entraîné dans l'instant par-dessus
un mur de clôture de neuf pieds 2,9 m, et
retomba de l'autre côté. Le ballon continua sa route, passa sur
la première allée du cours de la porte Bourbon, au grand étonnement
du peuple qui accourut pour le voir. Il alla retomber à plus de deux
cent cinquante pas, malheureusement sur deux arbres replacés nouvellement,
dont les tiges nues le crevèrent sur toute la longueur en plusieurs endroits."
Voyages aériens - par J.Glaisher, C.Flamarion, W.De Fonvielle et G.Tissandier - Hachette - 1870